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Avec Jean-Yves Lecuyer, un géant du trot s’en est allé | LETROT
Hommage

Avec Jean-Yves Lecuyer, un géant du trot s’en est allé

17/09/2024 - GRAND FORMAT - 24H au Trot
Les "Vivier" pleurent leur créateur et pygmalion tant il aura donné sa vie à ses chevaux. Jean-Yves Lecuyer s’est éteint "paisiblement", ce lundi, à l’âge de 84 ans. L’homme aura participé à l’histoire du trot français, avec un rayonnement à l’international, depuis les années 1960. Il a aussi contribué à en écrire plusieurs très belles pages, que ce soit dans la dimension compétition ou dans celle de l’élevage. Normand et fier de l’être, cet homme et chef d’entreprise était un terrien dans l’âme et un passionné d’élevage.
Jean-Yves Lécuyer Jean-Yves Lécuyer en 2005 à Vincennes - © ScoopDyga
Hadol du Vivier Hadol du Vivier remporte l'Elitloppet 1978

Une grande page de l'histoire du trot français

Quand il récupère à son nom Ua Uka (Kerjacques) à l'âge de 3 ans, après l’avoir entraînée pour le compte d’un notaire parisien, Jean-Pierre Delarue, Jean-Yves Lecuyer n’a pas encore 30 ans. Avec elle, il reçoit les fonts baptismaux d’un élevage d’exception. Il ne manquera pas son rendez-vous d’éleveur avec l’histoire en la mariant au mieux. "Ua Uka était une petite jument nerveuse avec des très belles allures. Il a fait ses croisements avec elle en cherchant des étalons avec un peu de taille et calmes", nous précise Étienne Roué-Lecuyer. Dans la saga d'élevage de Trot Informations n°244, en juin 2017, Jean-Yves Lecuyer dira : "Ua Uka est la plus grande poulinière Trotteur Français qui ait existé." Pourtant, parallèlement, il développe une approche d’élevage centrée sur l’étalon : "En élevage, le père est plus important que la mère. Combien a-t-on vu de cracks issus de mauvais étalons croisés avec des mères considérées comme très bonnes reproductrices ? (Pas ou peu) Tandis qu’a contrario, un étalon qui produit excellemment le fait avec toute une palette de juments. C’et la même chose qu’en élevage bovin."


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Un observateur né et les "croisements par les yeux"
"C’était un homme de cheval qui regardait les allures. Jusqu’au bout de sa vie, il a regardé les courses sur Equidia. Il donnait toujours son avis sur les chevaux, sur leur façon de bouger", nous rapporte son fils Étienne. Quand on l’interrogeait sur le secret de la réussite des "Vivier" dans Trot Informations en 1999, Jean-Yves Lecuyer rétorque : "Il n’y a pas de secret mais une volonté d’observer, de détailler et d’en tirer les conclusions qui s’imposent. J’aime bien dire que je fais mes croisements avec les yeux ; entendez par là que j’"harmonise" les qualités de la mère et celles du père en fonction de ce que je connais d’eux : modèle, allures, caractère, courants de sang."

 

Les Sept merveilles de Jean-Yves Lecuyer

Upsalin : cet élève de Jean-Yves Lecuyer, acheté et exploité par Henri Levesque, a été un champion (Critériums des 4 Ans et des 5 Ans, Prix du Président de la République, d’Amérique).
Ua Uka : après l’avoir entraînée (il dira dans une saga d’élevage de Trot Informations : "Elle n’était pas grande, devant mesurer 1,58-1,59 m. Elle était très distinguée, musclée, avec beaucoup d’influx nerveux, bien faite mais pas très forte, avec de belles allures, ni grandes, ni petites"), elle est devenue la fondation de l’élevage "du Vivier", produisant deux cracks sur les pistes (Fakir du Vivier et Hadol du Vivier) et deux étalons qui seront numéros 1 français (Fakir du Vivier en 1994 et Jet du Vivier en 1995 et 2001).
Fakir du Vivier : ses allures incomparables, tout en légèreté, et son port de tête l’ont rendu unique. À son palmarès (entre autres) : Prix René Ballière (en battant Béllino II), Critériums des 3 Ans, des 4 Ans et Continental, Gran Premio d’Europa, 2e, 3e et 4e du Prix d’Amérique, etc.
Hadol du Vivier : longtemps considéré comme le meilleur 3 et 4 ans de l’histoire (en France) avec 23 victoires en 24 sorties. À son palmarès (entre autres) : Elitloppet, Prix de France, René Ballière, Critériums des 3 Ans, des 4 ans et Continental, Gran Premio d’Europa, Prix des Géants, etc.
Jet du Vivier : modeste en courses, ce propre-frère de Fakir du Vivier est devenu deux fois tête de liste des étalons en France.
◆ Cedre Du Vivier : classique (2ème du Critérium des 4 Ans, du Prix de Paris à 6 ans), a remporté la Finale du GNT en 1995, une victoire marquante pour Jean-Yves Lecuyer.
◆ Hand Du Vivier : doué mais fragile, il a été un 4 ans étincelant, échouant néanmoins dans tous les classiques.

Autres candidat(e)s au titre de merveille :
Eva du Vivier (Prince des Veys) : premier produit de Ua Uka qui deviendra à son tour une grande reproductrice en direct (mère de Kronos du Vivier et Nicos du Vivier) ou par la descendance de ses filles
Jeanbat Du Vivier (Coktail Jet - 851.722 € de gains)
Ustinof Du Vivier (Look De Star - 1.150.890 €).

 

Un hommage

■ Jean-Pierre Thomain : "Avec sa disparition, c’est une grande page qui se tourne. Je garde beaucoup de très bons souvenirs de notre collaboration qui a duré une vingtaine d’années, pendant laquelle j’ai eu la chance d’être associé à de très nombreux grands chevaux. Les noms de Kronos du Vivier, Cèdre du Vivier ou encore Hand du Vivier me viennent tout de suite à l’esprit. On a vécu ensemble de grands moments et partagé de grandes victoires dans des Groupes. Je me rappelle entre autres de la victoire en 1995 dans la Finale du Grand National du Trot de Cèdre du Vivier qui avait beaucoup d’importance à ses yeux, lui qui était très attaché à la province."

 

Fakir du Vivier, une pépite de l'élevage - ©  Aprh Fakir du Vivier, une pépite de l'élevage - © Aprh

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