L'an prochain, cela fera tout juste vingt ans que Jag de Bellouet (Viking's Way) remportait le Prix de France. Après son Prix de Paris en 2004 et son Prix d'Amérique en 2005, lui le triple vainqueur du Prix de Cornulier complétait sa "trilogie" des plus grandes épreuves attelées du meeting d'hiver de Vincennes, ce qui en faisait l'égal de Bellino II (Boum III) pour ne citer que lui. La référence à son glorieux aîné illustre parfaitement la place qui est celle du cheval élevé par Jean-Claude Monthéan dans le Panthéon des courses de trot françaises.
En ce deuxième dimanche du mois de février 2006, Jag de Bellouet, qui vient de remporter pour la seconde année consécutive le Prix d'Amérique mais qui en sera privé quelques semaines plus tard en raison d'un contrôle positif qui révèlera une contamination accidentelle d'un lot de vitamines, est face à un nouveau défi : réussir à conquérir le Prix de France, ce qu'il n'est pas parvenu à faire lors des deux précédentes éditions. En 2004, après sa 3ème place dans le Prix d'Amérique, le suédois Naglo, un fils de Coktail Jet, l'a privé du titre. En 2005, celui qui vient de décrocher le Graal dans le Prix d'Amérique est victime de son numéro 1 derrière l'autostart dans une course très tactique et finit par se montrer fautif dans la phase finale alors que son driver ne sait plus où le mettre tant il a de ressources dans le sillage de ses concurrents.
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"Le n°9 n’était pas gênant pour "Jag". Pour lui, il valait mieux un numéro 7, 8 ou 9 derrière l’autostart qu’un numéro 1, 2 ou 3". (Christophe Gallier)
2006 sera donc l'année de son "France" à lui ! Avec le n°9 derrière l'autostart, on aurait pu pourtant avoir de légitimes craintes. Pas Christophe Gallier ! "Le n°9 n’était pas gênant pour "Jag". Pour lui, il valait mieux un numéro 7, 8 ou 9 derrière l’autostart qu’un numéro 1, 2 ou 3. À cette époque-là, il s’était mis à très bien partir et, à chaque fois, c’était go !", rappelle le professionnel normand qui, en raison des circonstances que l'on sait, a été amené à revoir ces derniers jour cette édition du Prix de France. "Jusqu’à l’entrée de la ligne droite, on croit que Gigant Neo va gagner la course avant que "Jag" ne redonne un dernier coup de reins pour faire la différence, raconte-t-il. Dominik (Locqueneux) avec Gigant Neo avait décidé ce jour-là de garder la tête, ce qui changeait les données par rapport au Prix d’Amérique, mais il avait bien raison car il fallait tenter quelque chose."
Parti quasiment aussi vite que le cheval entraîné par Stefan Melander, élancé du couloir n°2 lui, Jag de Bellouet va être fidèle à lui-même. "Il a négocié la descente en troisième épaisseur, mais ce n’était pas bien grave avec lui, poursuit Christophe Gallier, puis il s’est retrouvé à deux à l’extérieur du leader. Au poteau des mille cinq cents mètres, on était sur le pied de 1’07’’3. Dans la montée, Jean-Michel (Bazire) a mis un tir avec Kazire De Guez. Il y a eu alors un passage pas commun à l’intersection des pistes où on était trois de front, le pied dedans…"
"Cela aurait été dommage qu’il ne gagne pas un Prix de France. Cela aurait même été vexant, car il aimait beaucoup ce parcours". (Christophe Gallier)
Mais, dans le dernier tournant, pris en "sandwich" entre Gigant Neo et Kazire de Guez, Jag de Bellouet ne fait pas figure de vainqueur. C'est même presque le contraire. Ce dont se souvient bien son mentor : "À ce moment-là, le cheval de Dominik allait très, très bien. Même si "Jag" repartait toujours, ce n’était surtout pas fait pour nous. Quand j’ai abaissé les œillères, il a poussé un chouia à l’extérieur à la sortie du tournant, si bien qu’il a perdu quelques mètres. C’était chaud… Mais il fait vraiment la différence pour finir. Parmi nos combats avec Gigant Neo, je pense que c’est l'épreuve où Dominik y a le plus cru, ce qui est tout à fait normal au vu de la course".
Vainqueur dans la réduction kilométrique de 1'11''6, alors que le record avait été établi deux ans plus tôt par Naglo en 1'10''7, Jag de Bellouet parvient à inscrire son nom au palmarès d'un Groupe 1 dont le parcours lui convenait quand bien même on pouvait penser que ses aptitudes s'exprimaient mieux sur les longues distances. "Il adorait ça. Le fait de partir élancé derrière l'autostart en descendant était un avantage pour lui, souligne Christophe Gallier. Cela aurait été dommage qu’il ne gagne pas un Prix de France. Cela aurait même été vexant, car il aimait vraiment beaucoup ce parcours."
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Les titres de gloire de Jag de Bellouet sur le parcours de vitesse de la grande piste de Vincennes sont donc sa victoire dans ce Prix de France 2006 et ses succès dans le Prix René Ballière les deux années précédentes. "Sa victoire dans le Prix René Ballière en 2005 était sûrement sa plus belle performance sportive. Il avait parcouru l'ensemble des 2.100 mètres en 3ème épaisseur en s'imposant en 1'10''1 devant Love You et Jeanbat Du Vivier", nous a d'ailleurs confié Christophe Gallier en début de semaine dans l'hommage rendu au cheval de sa vie.