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Fakir du Vivier pilier de notre race | LETROT
Série de l'été - Les sagas

Fakir du Vivier pilier de notre race

27/09/2024 - PORTRAITS - SETF - Jacques Pauc
Nous vous proposons pendant tout l'été de retrouver les grands champions qui ont écrit la légende du Trot. Chaque vendredi, nous publions un article sur un cheval d'exception. Nous terminons la série avec Fakir du Vivier.
Fakir du Vivier ©DR - Fakir du Vivier
Coktail Jet ©Scoopdyga - Coktail Jet, petit-fils de Fakir du Vivier

FAKIR ET SES PRODUITS

Dès sa première année de monte, il donna Prince Royal 1’13’’ mais également Pacha Du Ponthieu 1’14’’ (4e Prix d’Europe) et Picarella 1’15’’ (4e Prix Ariste Hémard). Le premier nommé, signé par son père dans sa tête, se révéla assez tardivement au plus haut niveau, disputant l’Elitloppet en Suède et le Statue of Liberty aux Etats-Unis, terminant troisième d’Ourasi dans le Prix de France 1988 et gagnant le Prix Thierry de Cabanes. Dans la génération suivante, Quarisso 1’14’’ (Prix Capucine, Prix Kalmia, 2e Critérium des Jeunes) et Quouky Williams 1’14’’ (Prix Cavey Ainé, 5e Critérium des 3 Ans) brillèrent dès l’âge de 2 ans, confirmant le talent de Fakir du Vivier comme reproducteur.

Mais c’est le petit Rainbow Runner 1’13’’ (Critérium des 3 Ans, Prix de l’Etoile, 2e Critérium des 4 Ans) qui devait vraiment le lancer comme étalon. Très véloce, il fit dire à son entraineur Jean-Pierre Dubois qu’il aurait pu courir aux Etats-Unis à 3 ans. Parmi les mâles de « Fakir », Dahir De Prelong 1’13’’ fut sans doute le plus doué (Prix de Sélection, 2e Critériums des 3 et 4 Ans). Possédant un démarrage et des accélérations foudroyantes, il réussit l’exploit de battre ses aînés dans le Prix du Bourbonnais à l’âge de 4 ans. Bertrand Lefèvre mettait souvent l’accent sur sa grande vélocité. Arnaqueur 1’13’’ (Prix d’Europe, du Bourbonnais, 4e puis 3e du Prix d’Amérique), lui, démarra sa carrière au milieu de sa troisième année, s’étant accidenté à une rotule alors qu’il était yearling. Il battit l’élite de sa promotion à 4 ans (Prix Ariste Hémard), atteignant le plus haut niveau à 5 ans avec Karim Hawas. "L’année de la victoire de Sea Cove dans le Prix d’Amérique où il a terminé quatrième je me suis retrouvé longtemps bloqué, sinon il aurait fi ni plus près. » a-t-il souvent dit. Ukir De Jemma 1’13’’ (3e Critérium des 4 Ans) fit également l’arrivée du Prix d’Amérique en 1993 (2e de Queen L) avec Philippe Allaire qui le décrivait comme "un cheval très dur, un peu “steppeur’’ dans ses allures c’est pourquoi il a réussi aussi au monté".

Malgré tous ces bons mâles, ce fut parmi ses femelles que l’on trouva le meilleur produit de Fakir du Vivier. Sœur cadette d’Ourasi, elle se nommait Vourasie 1’12’’ et se construisit un palmarès exceptionnel. Elle s’affirma avec l’âge comme le meilleur trotteur Français sous l’entraînement de Léopold Verroken et aurait mérité de gagner un Prix d’Amérique. Elle remporta trois Prix de Paris et un Prix de France. Troisième de Queen L en 1993, battue d’une tête par Sea Cove en 1994 après un mauvais départ et d’un nez par Ina Scot en 1995, Vourasie manqua le sacre de peu. Cette grande jument était pourtant très panarde et ne « trottait pas rond » comme Quouky Williams, Dahir de Prelong, Arnaqueur ou Blue Eyes America, ayant plus d’envergure dans son geste. Son driver Bernard Oger rappelait souvent : "La ‘‘mémère’’ avait un courage et une tenue à toute épreuve. C’était la vraie jument de course, elle ne disait jamais non." 

Vourasie mourut jeune après avoir donné un seul foal. Dommage car Fakir fut aussi tête de liste des pères de mères, le champion suédois Victory Tilly 1’08’’7 (Elitloppet) ayant été le plus célèbre de ses petits-fils outre Full Account 1’13’’ (Prix de Sélection) ou Don Paulo 1’13’’(Prix du Président de la République). Malheureusement plusieurs des meilleurs rejetons de Fakir du Vivier eurent une carrière de reproducteurs assez courte. Ainsi Rainbow Runner 1’13’’ est mort jeune, après trois ans de monte (donnant le très rapide Bijou Du Bignon 1’11’’ (Sweden Cup) devenu père du champion Kool Du Caux 1’09’’ (Prix de France, 2e Prix d’Amérique) alors qu’Itou Jim 1’13‘’ (Prix de l’Union Européenne, 2e Prix de Cornulier) et Tsar D'inverne 1’11’’ (Derby Suédois), fils d’Arnaqueur, disparurent après un an de monte. Mais Fakir a tout de même réussi à être présent à travers les Rolling D'heripre 1’11’’, Korean 1’12’’ et Latinus 1’13’’(m) (Dahir de Prélong), Nimrod Borealis 1’10’’ et Princess Foot 1’12’’(Arnaqueur), Pirogue Jenilou 1’14’’(Blue Eyes America), sans oublier Ighanian 1’14’’et Ivulcania 1’13’’ (Volcan) ou Noise 1’13’’(Ekir De Leau). 

Ce fut cependant Quouky Williams, disparu après trois ans de monte, qui devait donner Coktail Jet 1’10’’ (Prix d’Amérique, Elitloppet), de son union avec la jument américaine Armbro Glamour. On notera en passant que l’on retrouve dans le pedigree de Coktail Jet l’affinité marquée de Fakir avec Star’s Pride. De nos jours, Coktail Jet est incontestablement le meilleur continuateur de la lignée mâle de Fakir du Vivier. Tête de liste des étalons à cinq reprises, on ne compte plus ses rejetons classiques. Parmi eux, Love You 1’10’’ (Critérium Continental) excelle au haras, donnant d’entrée la championne Qualita Bourbon 1’12’’ (Critérium des Jeunes, Continental, 3e Prix d’Amérique) et Quaker Jet 1’10’’(2e Prix d’Amérique), Look De Star 1’12’ (Critérium des Jeunes) a produit le vainqueur du Critérium des 5 Ans Roc Meslois 1’11’’, Kiwi 1’11’’ (Prix de Sélection) a donné Quaro 1’13’’ (Critériums des 3 et 4 Ans). Et In Love With You 1’13’’ (2e Critérium des 3 Ans) est le père de Nina Madrik 1’13’’ (Prix du Président de la République) et du vainqueur du Prix d’Amérique 2010 Oyonnax 1’10’’, un cheval solide, avec une belle tête, très dur et bon dans les deux disciplines. La lignée mâle de celui-ci peut s’écrire ainsi : Carioca II - Sabi Pas - Fakir du Vivier - Quouky Williams - Coktail Jet - In Love With You - Oyonnax.

Jean-Etienne Dubois entraîneur, driver mais aussi propriétaire et éleveur de Coktail Jet raconte au sujet de son crack: "J’avais mené Quouky Williams sur le tard, c’était un cheval vite, facile, avec un bon jeu de jambes. Il avait été bon à 2 ans chez Jan Kruithof. Coktail Jet, lui, est sorti tout de suite de l’ordinaire mais, jeune, il eut un problème à un genou non détecté, ce qui retarda ses débuts à 3 ans. Sinon, il aurait été excellent à 2 ans. Comme Fakir du Vivier il mouline devant, trottant en pliant le genou. Il ne ressemble pas à Super Bowl son grand-père maternel qui était assez long alors que Coktail est exactement aussi long que haut, mesurant 1,60 mètre. Coktail n’a jamais couru déferré des quatre pieds mais souvent des postérieurs. Il faut dire qu’il a des petits pieds et avait besoin ‘‘d’être bien dans ses chaussures ’’ pour trotter. Il a ainsi toujours eu des fers suédois avec une plaque de cuir aux antérieurs. Un jour, j’ai voulu lui mettre quatre aluminiums à Cagnes et il ne s’était pas trainé ; pourtant il était au mieux, venant de gagner les Prix d’Amérique et de France. Coktail Jet est un cheval brave qui possédait beaucoup de vitesse, et un sprint fabuleux. Maintenant ce n’était pas trop le cheval à aller devant et à contrer deux ou trois attaques. De ses produits je dirais que les bons montrent vite leur vitesse. Après ils ont un petit ou un gros moteur bien sûr, mais on sait vite à qui on a à faire."

On savait vite aussi à qui on avait à faire en voyant trotter Fakir du Vivier pourrait-on conclure. « Fakir » étant un des rares chevaux dont on a pu dire : « Vu une fois, jamais oublié. ».


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