Le code des courses est fait pour évoluer avec son temps. Et la décision validée sur la nouvelle règle encadrant l'usage de la cravache fera partie des changements majeurs dans l'histoire des courses au Trot. Elle entre en vigueur le 1er avril prochain, c'est-à-dire dans un peu plus de deux semaines.
Nous avons donc décidé de consacrer la quasi intégralité de 24h Le Mag à cette actualité, vous proposant un maximum d'informations et de réactions à ce sujet crucial. Pour sentir l'air du temps mais aussi à des fins pédagogiques pour les toutes les parties prenantes.
Que dit la règle ?
L’article 73 du code des courses de trot qui concerne le contrôle des matériels et conditions de leur utilisation en course a été modifié après validation du Comité de la SETF du 12 décembre 2024.
À compter du 1er avril 2025, la cravache peut être utilisée exclusivement :
◆ La cravache peut être utilisée exclusivement pour donner un signal au cheval ou pour diriger le cheval dans une situation où la sécurité des personnes et des chevaux est menacée (danger immédiat)
◆ Pour donner un signal à un cheval, seul un mouvement du poignet est toléré, sans mouvement de l'épaule ou du coude.
En outre et d’une manière générale, il est interdit de :
● solliciter un cheval avec la main ou le pied ;
● utiliser les rênes pour déplacer brutalement le mors dans la bouche ;
● passer les rênes sous la queue d’un cheval afin de le solliciter ;
● adopter tout comportement qui pourrait être considéré comme non respectueux envers un cheval ;
● utiliser ou tenir la cravache d'une manière autre que celle décrite dans le présent article.
Pour les courses au trot attelé :
Pendant toute la durée de la course, le jockey doit tenir les rênes à deux mains, excepté lors de l’activation des accessoires autorisés, action au cours de laquelle il est toléré de prendre les deux rênes dans une main.
● La cravache doit être tenue dans l’axe du cheval, verticalement ou posée sur l’épaule.
● La cravache peut être utilisée exclusivement dans l’axe du cheval, sans mouvement latéral.
Le modèle de cravache doit répondre aux exigences minimales suivantes :
● longueur totale de la cravache inférieure ou égale à 140 cm, y compris la mèche,
● couleur noire.
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Pour les courses au trot monté :
La cravache doit être tenue, et peut être utilisée exclusivement avec la pointe dirigée vers le bas.
Le modèle de cravache doit répondre aux exigences minimales suivantes :
● longueur totale de la cravache inférieure ou égale à 68 cm
● diamètre du corps supérieur ou égal à 1,3 cm
● Claquette en mousse recouverte de cuir ou de simili cuir d’une longueur minimum de 18 cm et d’une largeur minimum de 2,5 cm.
● couleur sombre
Les sanctions
Le barème est détaillé selon les catégories de course. La règle est la suivante : "Tout coup de cravache doit être sanctionné (heat ou course), quel que soit l’endroit du parcours où l’infraction a été commise". De plus, "Si plusieurs infractions sont effectuées dans une même course, chaque coup de cravache porté supplémentaire entraîne 1 jour d’interdiction de monter."
Tout coup de cravache doit être sanctionné (heat ou course), quel que soit l’endroit du parcours où l’infraction a été commise
Le barème adopté est progressif, avec une base pour la première infraction de 1% de l'allocation au 1er + 2 jours. Les mises à pied sont démultipliées en cas de récidive et pour les Quintés+ et Groupes.
Pour les apprentis et lads-jockeys et amateurs, les infractions seront punies de jours de mise à pied. Le tableau complet des sanctions ci-dessous.
Guillaume Maupas : "C'est une révolution"
Directeur des Courses et de l'Association SETF, Guillaume Maupas nous rappelle la genèse de cette nouvelle règle : "C'est une décision qui a été actée au niveau européen au mois de juillet dernier et votée à l'unanimité par tous les pays membres de l'U.E.T. Certains pays avaient déjà eux-mêmes modifié leur réglementation et elle s'impose à toutes les fédérations avec une obligation de mise en œuvre au plus tard le 1er avril 2025. C'est une révolution dans l'utilisation de la cravache. Premièrement, nous nous sommes battus pour qu'elle reste dans l'équipement du jockey ou driver car c'est un élément de sécurité. Deuxièmement, elle ne doit pas être utilisée pour donner des coups à un cheval dans le sens où un cheval ne doit pas gagner une course parce qu'il a reçu plus de coups qu'un autre. Elle doit juste permettre de donner des signaux par des mouvements de poignets".
"Un cheval ne doit pas gagner une course parce qu'il a reçu plus de coups qu'un autre". (Guillaume Maupas)
"En termes d'image, c'est une évolution très importante pour nos courses et nous notons les efforts effectués par nos drivers et jockeys depuis déjà plusieurs années. Ils modifient leurs comportements et, pour certains, cela ne va pas changer beaucoup de choses. Pour d'autres, il y aura un temps d'adaptation nécessaire, c'est sûr. Le tutoriel vidéo réalisé avec un professionnel doit permettre de bien visionner les gestes autorisés et ceux interdits. Un outil déterminant pour les professionnels comme pour les commissaires qui vont devoir veiller partout au respect de la nouvelle règle.
Le barème des sanctions a été voté en février et il est strict. Nous ne parlons plus d'usage abusif, car il n'y en aura plus par définition, mais d'un usage non-réglementaire. Il va également être publié dans les prochains jours. C'est une révolution dans les textes mais, dans la pratique, il y a déjà eu cette adaptation de la part des jockeys et drivers comme nous le voyons déjà depuis un certain temps."
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Un peu d'histoire... récente
Les précédentes étapes dans le cadre de la réglementation en lien avec la cravache :
◆ 2016 : Doublement des sanctions prévues dans le code au sujet des limites du nombre de coups de cravache.
◆ 2017 : Évolution de la définition du geste autorisé avec l’intégration de la limite de la main au-dessus de la ligne de l’épaule.
◆ 2020 : Passage de 7 coups maximum autorisés dans les 200 derniers mètres à 7 coups dans les 500 derniers mètres dont 3 coups au maximum dans les 200 derniers mètres.
◆ 2024 : Vote de la loi interdisant les coups et autorisant uniquement les sollicitations.
◆ 2025 : 1er avril, application de la nouvelle règle.
Une vidéo pour tout comprendre
Un tutoriel a été réalisé ces dernières semaines avec l'aide de Benjamin Rochard et
Mon Loup (trotteur d'Antonio Ripoll-Rigo). La vidéo a été adressée ce vendredi aux commissaires (lesquels sont aussi (in)formés directement) et aux professionnels et sera disponible sur Youtube. Nous vous proposons de la découvrir ci-dessous.
Gagneurs dans l'âme
L'une des questions sera celle des arrivées disputées où il convient de défendre les intérêts de l'entourage du cheval et des parieurs. Pour ceux qu'on appelle les "pilotes", la transition pourrait être un vrai challenge, surtout après des années de haut niveau et d'habitudes bien ancrées. Nous sommes donc allés demander à Éric Raffin et Alexandre Abrivard, treize titres de Sulky d'Or et Étrier d'Or à eux deux, de nous livrer leur sentiment à quelques jours de la mise en œuvre de la nouvelle règle.
Éric Raffin
"Nous sommes prêts, oui et non. Nous avons des mauvais défauts acquis depuis de nombreuses années. Lorsque tu arrives à la lutte et qu'un coup de cravache permet à ton cheval d'aller un peu plus vite, tu as tendance à continuer. Nous allons avoir besoin d'un temps d'adaptation. Je ne suis pas certain que l'ensemble de mes collègues ait pris connaissance du nouveau règlement et des conséquences. Il ne faudra pas léser les parieurs également lorsque nous serons à la lutte pour les premières places. Je vais m'interdire de taper sur le flanc au trot monté, car je suis certain de prendre des sanctions à chaque course. Les entraîneurs devront équiper les chevaux froids à défaut de nos sollicitations. C'est une avancée pour le spectacle, à nous de nous adapter. J'essaye d'y penser et d'adapter ma façon de mener depuis quelques jours."
"Il ne faudra pas léser les parieurs également lorsque nous serons à la lutte pour les premières places." (Éric Raffin)
Alexandre Abrivard
"Je me sens prêt et, de toute façon, nous n'avons pas le choix. Il y a déjà eu des restrictions depuis quelques saisons et nous y sommes arrivés. J'essaye de ne pas être trop virulent et les seules amendes que j'ai prises cet hiver ont été dans les deux grandes épreuves du meeting où j'étais à la lutte pour les premières places. J'ai pris connaissance des gestes autorisés dans les deux spécialités. Je ne sais pas si l'ensemble de mes collègues a assimilé le nouveau règlement. Une chose importante est le fait qu'ils nous laissent le droit de solliciter nos chevaux sur le flanc au trot monté, surtout pour la nouvelle génération. La cravache permet de guider nos chevaux s'ils poussent, surtout en sortie de tournant. J'espère que nous aurons quelques semaines d'adaptation pour effectuer la transition."
Le sulky Yankee comme un allié
La nouvelle réglementation et sa mise en application le 1er avril coïncident avec l’avènement d’un outil de plus en plus répandu : le sulky dit de type américain. Dans notre dossier automnal sur le sujet, Éric Raffin expliquait déjà il y a six mois : "Regardez les drivers dans la phase finale, ils sollicitent différemment leur cheval, ne donnent pas ou peu de coups de cravache et le cheval termine souvent mieux ses parcours. Il agit comme une propulsion. J’ai l’impression que ce sulky libère le cheval et il lui permet d’utiliser plus ses postérieurs".
La sensation révélée par Éric Raffin dès le mois d’octobre dernier dans nos colonnes a fait son chemin comme le prouve le témoignage de Quentin Chauve-Laffay, visiblement convaincu : "Avec ce nouveau règlement, on ne pourra plus solliciter comme avant. Il faut donc trouver des alternatives. Or, selon moi, l’utilisation du sulky dit américain est la bonne alternative, car cela met tellement les chevaux de l’avant que nous n’avons pas besoin de les solliciter. Les chevaux se donnent vraiment à 100 %. De toute façon, quand tu les sollicites avec ce sulky, cela ne change rien. Autant ça va être compliqué avec les chevaux que l’on doit solliciter avec un sulky "normal", autant ils sont tellement propulsés avec le sulky américain que l’on n’a pas besoin de les solliciter. En tout cas, c’est mon ressenti après l’avoir utilisé".
Matthieu Abrivard déclare sa lassitude dans ParisTurf
Dans le cadre de sa rubrique hebdomadaire dans ParisTurf, Matthieu Abrivard considère cette mesure inutile, précisant : "il faut arrêter, nous prenons plus soin de nos chevaux que de nous-même" et de demander à ce qu'on "laisse un peu tranquille" les professionnels. Il ajoute : "S'il y en a un qui dérape, il doit être aligné, c'est normal. Mais il faut arrêter, ça va trop loin".
Êtes-vous prêt(s) ? par Pierre Vercruysse
"Personnellement oui ! Collectivement, je ne pense pas ! Mes collègues ont un planning très chargé avec les jours de courses successifs et une charge de travail importante. Beaucoup n'ont pas pris le temps de lire le règlement. Je leur conseille pourtant vivement de le faire rapidement car, dès le 1er avril, s'il est appliqué à la lettre, les sanctions sont très sévères et les erreurs ne seront plus permises. L'adaptation va être difficile, même s'il y a eu des progrès ces dernières années, car le règlement est strict. Pour des questions d'image au sujet du bien-être animal, il faut solliciter son cheval avec parcimonie et, lorsqu'il a donné son maximum, être en mesure de s'en rendre compte. Quant aux chevaux froids, ils devront sûrement courir avec plus d'artifices qu'avant et les entraîneurs et drivers devront s'y adapter. Les turfistes ? Ils aiment les luttes à l'arrivée c'est vrai, mais je pense qu'une information sera également importante et la bienvenue auprès de nos fidèles clients. L'information est impérative pour accompagner cette évolution. Tous les sports connaissent une évolution constante, à l'instar du foot, de la F1, dans le rugby, les sports de contacts et même encore récemment le football américain, sport que je connais bien. Il faut prendre cette nouvelle réglementation comme une évolution et une modernisation de notre sport. Peut-être que certaines personnes dérangées par les coups de cravache dans le passé effectueront leur retour sur nos hippodromes en voyant l'amélioration du spectacle proposé ! Ce serait le scénario idéal."
"Il faut prendre cette nouvelle réglementation comme une évolution et une modernisation de notre sport." (Pierre Vercruysse)
Une étude scientifique pour statuer sur l'utilité du "coup" de cravache
En Scandinavie, le sujet du bien-être du cheval est ultra présent dans les esprits du public, et l’utilisation de la cravache se retrouve en première ligne. Loin des émotions extrêmes des activistes ou des habitudes bien-ancrées des socio-pros, une étude indépendante scientifique réalisée en Suède, co-financée par le Swedish Trotting Association et l’Université Suédoise de Sciences Agricoles, a été publiée au mois de janvier 2025. Cette étude analyse l’effet de la cravache sur les performances des chevaux dans des courses de trot attelé et doit, à notre connaissance, être la seule du genre au monde. Nous vous proposons ici d'en connaître les grandes lignes.
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Le but
L’objectif des recherches était d’explorer :
● Si l’utilisation de la cravache a une influence sur la position à l’arrivée parmi les trois premiers.
● L’effet des coups de cravache sur les changements de vitesse dans la phase finale des courses de trot.
● Si les coups de cravache dans les courses de trot sont potentiellement conformes au principe d'entraînement du renforcement négatif.
La définition du renforcement négatif est la suivante : l'apparition d'un comportement est immédiatement suivie par le retrait d'un stimulus ou d'un événement désagréable, aversif, ce qui augmente la probabilité d'apparition du comportement. Autrement dit, si un cheval ralentit, il reçoit un coup de cravache, son comportement de ralentissement s’accentue.
La méthode
Les quatre chercheurs, tous basés à l’Université Suédoise de Sciences Agricoles, ont analysé les données de 16 épreuves de trot attelé disputées en Suède en 2018-2019 (l’utilisation de la cravache est désormais plus restreinte). Les courses ont été sélectionnées selon les 9 critères suivants pour éviter des comportements et résultats irréguliers :
1️⃣. Réservées aux standardbreds
2️⃣. Agés de 3 ans et plus
3️⃣. Chevaux aux gains entre 100.000 - 500. 000 SEK (10.000 - 50.000€ environ)
4️⃣. Départ avec autostart
5️⃣. Courses sur 2.140m.
6️⃣. Excluant des pistes avec open stretch
7️⃣. Uniquement courses trackées
8️⃣. Pistes légères
9️⃣. Courses faisant partie du pari V75
Les trois premiers chevaux de chaque course, soit un total de 48 performances, ont été observés pendant les 800 derniers mètres, et cette phase finale a été divisée en quatre parties : 0-100m., 100-200m., 200-400m. et 400-800m. de la ligne d’arrivée. Pour ce faire, des heures de visionnage, image par image, en s’appuyant aussi sur les données tracking enregistrées par l’opérateur ATG et la chaîne Kanal75.
Les coups de cravache ont été comptabilisés et la vitesse du cheval calculé 3 secondes avant, au moment du coup de cravache et 3 secondes après. Le délai de trois secondes a été choisi car il s’agit du délai généralement accepté dans la filière hippique pour qu’un cheval réagisse à la cravache.
268 coups ont été enregistrés, distribués ainsi :
■ 800-400m. : 29
■ 400-200m : 56
■ 200-100m. : 93
■ Derniers 100m. : 90
Les chevaux observés ont reçu entre 0 et 16 coups. Cinq chevaux n’ayant reçu aucun coup de cravache ont terminé premier (2 chevaux), deuxième (2) et troisième (1). Celui qui a été frappé à 16 reprises a pris une deuxième place.
Les observations :
→ Un coup de cravache a tendance à être suivi d’une décélération.
→ Cet effet s’accentue quand le cheval s’approche de l’arrivée d’une course, d’autant que la plupart des coups de cravache sont donnés pendant les derniers 200m.
→ Ce constat confirme les conclusions d'une étude sur les courses de pur-sang réalisée par Evans et McGreevy (2011), selon laquelle la vitesse des chevaux dans la phase finale est en corrélation négative avec le nombre de coups de cravache.
Les auteurs de l'étude constatent : "Le nombre de coups ne présentait aucune corrélation avec la position finale des trois premiers chevaux de la course. La plupart des coups ont été portés entre 200 et 100m. de la ligne d'arrivée. Frapper un cheval fatigué ou incapable de répondre par une accélération est éthiquement très difficile à justifier. Lorsque les drivers continuent à frapper leurs chevaux, cela peut être basé sur la perception de leur position par rapport à celle des autres chevaux et à la ligne d'arrivée, plutôt que sur la vitesse réelle ou le changement de vitesse".
CONCLUSION
L'examen des séquences vidéo des 16 courses a révélé que le nombre de coups de cravache reçus ne variait pas entre les chevaux terminant dans les trois premières places et que les coups de cravache étaient le plus souvent suivis d'une décélération. Les observations indiquent également que les coups de cravache suivis d'une décélération peuvent constituer un exemple de renforcement négatif, en apprenant aux chevaux à ralentir.
À la lumière de ces conclusions, les coups de cravache visant à encourager les chevaux à courir plus vite en fin de course semblent inutiles et devraient être évités du point de vue du bien-être des chevaux.
La question de la formation
Si le changement des habitudes s'annonce crucial pour les professionnels aguerris, comment se construit l'avenir ? Quelles règles sont apprises dans le cadre de leur formation ? Pascal Launey, chef d'établissement de l'Académie de Graignes, nous explique : "L'Afasec est très vigilante au bien-être animal et à la formation de ses apprenants. Depuis quelques années déjà, l'utilisation de la cravache est interdite. Toutefois, les jeunes apprennent à monter ou driver en la portant, puisque cela fait partie de la réglementation des courses. En course école ou lors des épreuves du concours du MAF, l'utilisation de cette dernière est interdite et ceci est systématiquement rappelé. Un apprenant qui ferait un mauvais usage lors des séquences de formation se verrait mis à pied à l'écurie d'application (il resterait uniquement dans la cour, au travail à pied)."
Deux points de vue, deux ambiances
David Békaert : "Nous allons devoir nous adapter tout simplement. Dans certains pays européens, la cravache est déjà totalement interdite. J’ai l’impression que l’on va gentiment vers cela. J’ai vu que certains avaient commencé à courir sans cravache, c’est peut-être la solution pour ne pas être sanctionné à répétition. En Suède, les drivers se sont adaptés à ce règlement qui n’autorise que le mouvement du poignet. Il n’y a pas de raison que nous ne parvenions pas à faire la même chose. Cette interdiction peut peut-être faire du bien à l’image des courses."
Junior Guelpa : "Je n’utilisais pas souvent la cravache et je trouvais que l’on prenait des amendes souvent pour pas grand-chose. Elle n’est pas supprimée par le nouveau règlement, mais on n’aura pas le droit de s’en servir. Alors cela ne sert à rien de l’avoir. Depuis le début de l’année, je drive sans. Il faut croire que cela ne se passe pas si mal. Quand j’ai vu que j’arrivais à courir Eberton sans cravache et que je réussissais à le faire avancer, je me suis dit que ça irait pour tous les autres. Il faut faire différemment. J’entraînais déjà sans cravache, il faut leur apprendre autrement pour les faire avancer. Dès lors, les chevaux sont aussi habitués. Au moins en prenant cette décision, je règle le problème des amendes ou des suspensions que l’on prend bêtement parfois pour un coup de trop dans la ligne droite. Maintenant, personnellement, je ne pense pas que cela soit une bonne chose, parce que l’on a quand même besoin dans certains cas. J’aurais préféré peut-être qu’on la limite encore et que l’on sanctionne les gens qui ne font pas attention.
"C’est bien pour l’image mais comment vont réagir les parieurs quand ils verront que les drivers ne bougent pas et ne sollicitent pas leurs chevaux ?" (Junior Guelpa)
Ce n’est pas une évolution qui va dans le bon sens à mes yeux. C’est bien pour l’image mais comment vont réagir les parieurs quand ils verront que les drivers ne bougent pas et ne sollicitent pas leurs chevaux ? Est-ce qu’ils auront encore envie de parier sur les courses ? Idem pour les propriétaires. Pour moi, c’est un peu l’arbre qui cache la forêt, car on ne voit pas ce qui est fait à l’entraînement pour essayer de faire avancer plus vite les chevaux avec des artifices pas très agréables."
Qu'en pensent les propriétaires ?
Sollicité pour connaître le point de vue des propriétaires, le Syndicat National des Propriétaires de Trotteurs (SNPT) a répondu par la voix de sa Présidente Nancy Marandon : "Les membres du syndicat sont évidemment favorables aux réglementations qui renforcent la protection de leurs chevaux et à leur bien-être. Personnellement, j’entends bien que les professionnels demandent à conserver un équipement comme la cravache pour des questions de sécurité. Au sein du SNPT, nous sommes en faveur de l’évolution de la règlementation afin que les chevaux ne reçoivent plus de coups et que les drivers-jockeys sollicitent leur partenaire seulement par un mouvement du poignet. Pour l’image des courses, c’est primordial, surtout à notre époque où les lobbies autour du bien-être animal sont importants. C’est un sujet dont on parle depuis assez longtemps entre nous. Chacun aura sa manière de voir les choses et d'appréhender une situation qui le concernera personnellement. Mais on ne peut que constater les avancées sur ce sujet de l’utilisation de la cravache à travers le monde"
La position du SEDJ
Le Syndicat des Entraîneurs, Drivers et Jockeys de trot (SEDJ) est naturellement sensibilisé à cette évolution de l'utilisation de la cravache. "On a toujours défendu au sein du syndicat la défense de la cravache comme équipement complémentaire du driver-jockey. Cette nouvelle réglementation permet de conserver cet équipement, ce qui nous convient, se satisfait de ce point de vue Stéphane Meunier, le Président du syndicat. Vis-à-vis de l’image des courses et du bien-être animal mais aussi des propriétaires et des turfistes, on a toujours eu une position en faveur de réglementations durcies sur l’utilisation d’équipements qui peuvent nuire à l’intégrité d’un cheval."
Maintenant que cette nouvelle réglementation a été votée par le Comité de la SETF, le syndicat veut s'assurer de son application dans les faits à compter du 1er avril sur l'ensemble du territoire, quelle que soit la catégorie de l'hippodrome. "On se pose beaucoup de questions sur sa mise en place, confirme Stéphane Meunier. Nous avons des interrogations et attendons donc avec impatience la diffusion du tutoriel que la SETF a préparé. Sur le terrain, nous voulons être bien jugés. Tout le monde est conscient qu’il faut changer notre façon de solliciter les chevaux, ce que l’on voit déjà bien depuis quelque temps et qui se traduit dans les faits. Mais je sens comme une appréhension de la profession dans le sens où elle veut être bien jugée. Les professionnels ne sont pas contre les sanctions, mais ils veulent être bien jugés sur tous les hippodromes."
"Les professionnels ne sont pas contre les sanctions, mais ils veulent être bien jugés sur tous les hippodromes". (Stéphane Meunier)
Pour le Président du SEDJ, cette nouvelle réglementation doit aussi s’accompagner d’un travail sur le sujet des distances. "C’est bien beau de pointer du doigt les drivers et jockeys, mais il faut travailler sur cet aspect des très longues distances que nous pouvons connaître sur certains hippodromes, défend-il. Dans ma région (la Basse-Normandie), cela a été fait de manière à réduire certaines distances. Il faut que le programme s’adapte aussi à cette évolution."
L’Association Nationale des Turfistes (ANT) n’a pas répondu à nos demandes sur le sujet.